La distance entre collègues d’une même organisation, imposée par les pouvoirs publics du fait d’une crise sanitaire sans précédent dans l’histoire récente, a « chamboulé » le quotidien des salariés français. A l’instar des crises qui surgissent promptement, en mars 2020 les salariés ont été écroués sans autre forme de procès sous la forme du 100% en télétravail. Face à l’urgence, les entreprises se sont réorganisées précipitamment, sans avoir pour la majorité d’entre elles, anticipé les conséquences de ce nouveau paradigme d’interactions professionnelles. Plus que de la communication de crise, le télétravail a engendré une forme nouvelle de crise de la communication, des échanges de communications sensible…
La fameuse expression « d’où parles-tu camarade » chère aux soixante-huitards vit malgré-elle, et sans rapport avec la révolte étudiante du siècle dernier, une cure de jouvence. Certes le télétravail déporte chacun dans un nouvel univers de collaboration mais transforme aussi son rôle, sa place et sa parole. Porté aux nues par les médias en mars dernier, depuis, le télétravail aura certes révélé des vertus mais également de nombreuses occasions de crises de nerfs ; au travail tout comme à la maison.
L’équipe de Coriolink vous éclaire sur ce phénomène et les tendances qui l’accompagnent.
Etat des lieux du télétravail et de la crise
La crise sanitaire a contraint de nombreuses entreprises françaises à imposer le télétravail à leurs salariés. Il s’agissait de l’unique solution conciliant travail et confinement.
Les salariés de tous secteurs confondus ont accueilli avec enthousiasme ce nouveau mode de travail. Inédit, temporaire et plaisant pour un bon nombre d’entre eux, le télétravail représentait des avantages novateurs et bienfaisants.
Au premier abord, il semblait être un dispositif fiable et ambitieux. Il donnait l’opportunité aux entreprises et à leurs membres de trouver le point d’équilibre entre l’économique et le social :
- Effet direct modal : économies de temps et d’argent opérées sur le trajet et les transports.
- Source de bien-être : possibilité de s’organiser différemment et d’optimiser son quotidien.
- Salariés responsabilisés : plus d’autonomie et de productivité (et moins d’absentéisme et de retard).
- Compétitivité entre les salariés : motivée par une volonté individuelle de faire plus que le minimum pour se démarquer.
Un télétravail imposé et profitable ?
Le succès du télétravail relève de deux éléments : l’organisation et l’accès au matériel. De sorte a assuré une dynamique de groupe, stabiliser la productivité de l’entreprise, et veiller au bien-être des salariés.
Mais par-dessus tout, une vie télétravaillée réussie et profitable à tous, dépend de la notion de choix. Changer de décor et de rythme de vie est déstabilisant pour chacun des membres d’une entreprise. Excepté si l’initiative vient de ces derniers. Tout changement peut être appliqué et accueilli avec motivation. Mais encore faut-il qu’il soit organisé en amont et voulu par les membres d’une entreprise. Une organisation opérée dans l’urgence et la précipitation change la donne.
La crise actuelle a entrainé un télétravail forcé, intensif et contraignant, qui s’inscrit sur le long terme. D’après les chiffres du ministère du travail, il s’agit de 1/4 des salariés fin mars. De 50% fin mai. Et 70% en novembre concernés par le télétravail. La vie télétravaillée est désormais perçue comme un mal nécessaire sans fin.
38% des employés français interrogés par ClickShare ont trouvé que le télétravail n’était plus aussi agréable qu’à ses débuts. La moitié des employés ayant eu recours au télétravail durant la période de confinement souhaitait télétravailler davantage après celui-ci. Tandis qu’en septembre 2020, seulement 29% disaient le vouloir.
A l’heure actuelle, le lieu de travail est l’endroit le plus structurant pour quiconque, indépendamment de la cellule familiale. Tout changement au sein de cet environnement peut conduire à des périodes d’incertitude, de conflit et de souffrance.
Un télétravail imposé ne peut que révéler les mauvais aspects de la vie télétravaillée. La pression interne et externe que les employés subissent n’a d’autre option que d’affecter négativement leur santé. Ils sont nombreux à rencontrer des difficultés de séparation entre sphère professionnelle et privée, de l’isolement, une augmentation de la charge mentale, de l’hyper-connexion, des périodes dépressives etc. Sans compter les rapports distanciés entre collègues qui nuisent également à la productivité de l’entreprise, au regard d’un manque de communication interne. En effet, les salariés peuvent être réticents à l’idée de se tourner vers leurs collègues pour obtenir une quelconque information, la démarche semble souvent trop importante pour le retour attendu.
A la fin de l’année 2020, dans le cadre d’une étude sur le télétravail, l’IFOP a sondé des employés : 65% des interrogés estimaient ressentir des effets secondaires psychiques. Des dispositifs d’aide psychologiques ont été créés en réponse à ces chiffres alarmants. Tels que la hotline cogito’z, initiée pour veiller à la santé de tout salarié confondu.
L’homéostasie organisationnelle en période de crise
L’organisation, hors temps de crise n’est pas la même que celle opérée pendant les tempêtes. En conséquence, appliquer la même méthode de travail interne sur ces deux périodes ne donnera pas lieu au même résultat.
Le principe, semblant paradoxal pour un bon nombre de firme, est de tout changer pour que rien ne change.
L’écosystème que forme une entreprise est supposé être suffisamment solide pour résister à toutes perturbations et conserver ainsi son équilibre. En s’imposant, le télétravail a affecté son environnement, bouleversant ainsi son organisation, ses relations et ses performances.
Les membres appliquent les changements nécessaires pour le maintien d’un équilibre et de la dynamique de groupe. Mais ces derniers ne relèvent pas directement des salariés. Ils proviennent des systèmes de régulation qui s’appliquent à eux : mise en place de travail individuel, création d’équipe, recours à des dispositif digitaux etc. Chaque entreprise à ses propres dispositifs et ses systèmes de régulation. Plus ces derniers sont solides et présents au sein de l’entreprise, plus l’équilibre aura de chance d’être maintenu.
Sans cette capacité de résistance et la force de système de régulation, l’entreprise sera plus faible face à une menace influençant son environnement.
Ces nouveaux facteurs apparu lors de la crise actuelle ont poussé les employés à se questionner.
« Est-ce que mes missions sont utiles ? Suis-je heureux dans cette structure ? Est-ce que je ne serais pas mieux ailleurs ? »
Welcome to the Jungle a réalisé une étude révélant que 50% des salariés en télétravail reconnaissent qu’ils ont envisagé / changé d’employeurs depuis le confinement. Ces interrogations conduisent certains à démissionner, d’autres attendent que la crise se termine pour changer de travail.
Concept de marque employeur renforcé pour prévenir la crise
La souffrance au travail couplé à une crise de la commuication a un coût. Lorsqu’une crise affecte les salariés, c’est un éclatement du corps social et de la fidélité des équipes que risque l’entreprise.
Une période de crise est une période de mises à l’épreuve pour les firmes. En effet, c’est durant ces périodes que l’engagement des employés et leur fidélité sont révélés. Le télétravail a provoqué un jeu entre l’engagement et le désengagement du salarié.
La force d’attraction est un bon indicateur ; plus elle est grande, plus ses membres auront la volonté de rester soudés durant les temps de tempête. A l’inverse, si le lien n’est que fonctionnel, s’il n’existe que par les titres et la hiérarchie, l’attachement s’en verra affaibli.
En temps de crise, l’enjeu premier des entreprises est de stabiliser, voire de renforcer, l’engagement de ses employés. La firme doit cependant redoubler d’attention pour certains salariés. Notamment les jeunes et des nouveaux arrivants qui sont davantage touchés par cette situation de crise. L’étude de l’IFOP met en lumière que 55% des moins de trente ans perçoivent leur collaborateurs comme des amis et pas seulement comme des relations professionnelles.
Pour lutter contre le désengagement, il est nécessaire de renforcer la marque employeur à travers des outils et dispositifs interactifs visant à conquérir et fidéliser les talents de l’entreprise. Plus concrètement, il s’agit de marketing et de communication interne destinés à améliorer la qualité de vie professionnelle.
Enedis, gestionnaire du réseau de distribution d’électricité, l’illustre parfaitement. La société a saisi l’outil de valorisation dans le but d’optimiser la performance de ses employés. En pratique, le groupe a mis à l’honneur ses salariés sur les réseaux sociaux afin de mettre un visage sur chaque projet professionnel mené. Pour cela, il s’est assuré que les indicateurs de méritocratie soient compris et acceptés par tous. Enedis a transformé une démarche de distinction en un système de récompense.
Les facteurs conditionnant l’engagement des salariés sont l’atmosphère de travail, l’ensemble des avantages fonctionnels, la rémunération, la formation et avant tout : la transmission d’information. Le bon fonctionnement de la structure dépendent essentiellement des périodes hors communication de crise. En effet, avoir connaissance de l’actualité, des nouveautés, des projets de son équipe mais aussi des autres collaborateurs qui nous entourent même si nous ne sommes pas amenés à travailler directement ensemble contribue au bien-être de l’entreprise et de ses membres.
Dans chaque entreprise, les différentes équipes et leurs membres peuvent rencontrer des difficulté lié à de leur communication de crise. Ceci en raison de l’éloignement de chacun et de la demande d’autonomie. Allant de la perte de dialogue jusqu’à la dislocation totale de l’équipe en passant par des conflits.
Le défi majeur des entreprises en temps de crise est de trouver une organisation de travail permettant de conserver un équilibre collectif. Force est de constater que si la productivité individuelle n’a pas été affectée, la productivité collective ne s’en est pas sortie intact. Il s’agit en moyenne de 25% de baisse de productivité, au regard de l’isolement du collectif.
La communication interne nécessite une préparation et un suivi continuel, que la crise frappe ou non afin de la prévenir. Elle a permit à firmes de sortir gagnant de la crise. Cependant, elle s’est vue délaissée et négligée par les entreprises en raison de la situation d’urgence. Ces dernières tentant de prévenir la faillite, la crise de la communication et la crise sanitaire au lieu de s’intéresser au bien-être des membres de l’entreprise.